Plus d’une centaine d’hôtels particuliers parsèment le centre historique de Toulouse. Ils reflètent dans la brique – et parfois dans la pierre – la richesse et la puissance de leurs propriétaires.
Capitouls, marchands du pastel, parlementaires, voilà au fil des siècles les principaux acteurs ayant donné naissance à ces nombreux hôtels particuliers.
Au 16ème siècle Toulouse connut une ère de grande prospérité grâce au commerce du pastel. Seule teinture alors connue à donner du bleu, il était indispensable aux grandes « industries » textiles de Burgos, Londres, Anvers ou Rouen. Ce siècle d’or a donné à la ville quelques merveilles Renaissance qui souvent se cachent dans des cours peu connues du grand public.
(Si le sujet de l’architecture toulousaine de la Renaissance vous intéresse, j’ai également réalisé quelques pages sur l’architecture Renaissance de Toulouse).
L’hôtel d’Assézat
Construit à partir de 1555, l’hôtel du riche marchand Pierre d’Assézat a été érigé juste avant le krach du pastel provoqué par les guerres de religion et l’arrivée sur le marché européen de l’indigo, un concurrent moins cher dans la gamme des teintures bleues. A tous les égards il constitue donc le clou de cette période dorée de l’architecture privée toulousaine.
Ses façades sur cour sont un superbe exemple d’architecture Renaissance classique, mettant en œuvre les trois ordres architecturaux théorisés par les architectes italiens de la Renaissance Serlio et Palladio : colonnes aux chapiteaux doriques, ioniques et corinthiens.
L’hôtel abrite de nos jours la fondation Bemberg (un très riche musée d’art) ainsi que les vénérables sociétés savantes et académies de Toulouse, dont deux des trois anciennes académies royales. Parmi elles la plus vieille société littéraire d’Europe, et sans doute du monde, créée en 1323 : l’Académie des Jeux floraux.
La tour capitulaire :
Le heurtoir du portail d’entrée :
Des sculptures décorent le fronton du portail, parmi elles des visages d’Indiens d’Amérique. Il était de bon ton pour un homme tel que Pierre d’Assézat de montrer qu’il s’intéressait aux nouvelles du monde :
L’hôtel de Bernuy
L’hôtel de Bernuy fut le premier « grand » hôtel du pastel à Toulouse. Il abrite deux cours, l’une gothique en brique (vers 1503), avec une des plus belles tours capitulaires de la ville, l’autre Renaissance en pierre (vers 1530) dont un moulage a été réalisé pour trôner à la Cité de l’Architecture et du Patrimoine au palais de Chaillot afin d’illustrer le style de la première Renaissance en France ; c’est dire par conséquent son intérêt au plan national, même si les murs noircis de pollution gagneraient beaucoup à être nettoyés.
Jean de Bernuy était si riche qu’il se porta caution auprès de Charles-Quint de la faramineuse rançon exigée pour la libération du roi François Ier fait prisonnier à la bataille de Pavie en 1525. A titre de remerciement il eut l’honneur de recevoir le roi et sa cour dans son hôtel juste terminé. Il fut capitoul en 1533.
La cour gothique et sa superbe tour de 1504, emblématique des tours capitulaires toulousaines :
La cour Renaissance a été bâtie en pierre :
Le portail de la rue, daté de 1504 :
La devise des Bernuy est gravée en latin : SI DEUS PRO NOBIS, début d’une phrase de la Bible signifiant « Si Dieu est avec nous, qui sera contre nous ? » :
L’hôtel du Vieux-Raisin
Cet hôtel Renaissance au très riche décor sculpté a été bâti en deux phases : une première à partir de 1515, et une deuxième vers 1585-1590 mettant à l’honneur l’ordre caryatide. Il s’agit également de l’un des édifices où le jeu décoratif de la brique taillée et de la pierre sculptée est le plus visible.
Au-dessus de la porte de la tour se lit la devise : VIVITUR INGENIO CETERA MORTIS ERUNT, « On vit par l’esprit, tout le reste appartient à la mort » :
Cette façon de disposer le décor dans des cartouches de « cuir découpé » (la sculpture rappelle par sa forme un morceau de cuir découpé et enroulé) fut utilisée pour la première fois au château de Fontainebleau :
L’hôtel de pierre
L’hôtel de pierre est de style Renaissance tardive (début 17ème siècle).
La façade toute en pierre est spectaculaire et signe la richesse de son propriétaire, vu le prix de celle-ci sur le marché toulousain à cette époque. Les sculptures dans la cour auraient bien besoin d’un ravalement, notamment les deux superbes atlantes vieillards encadrant la porte.
Les atlantes du portail de la cour intérieure, malheureusement bien noircis de pollution :
Autres hôtels…
Pour le plaisir des yeux voici quelques photos d’autres hôtels particuliers que je ne détaillerai pas. Si vous désirez en voir et savoir plus vous pourrez les retrouver, avec bien d’autres, sur mon site web Toulouse et la brique dont le présent site n’est qu’une version (très) allégée.
Eh non vous ne rêvez pas, ce lion louche !
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